Les jours passent mais on va décidément moins vite; la faute principalement au dénivelé mais aussi aux sublimes paysages et possibilités pauses dans des fincas colombiennes.
En redescendant de Salento, nous nous sommes arrêtés dans une première finca; La Aurora. L’exploitation de café est gérée par Maria Ángeles, une Espagnole qui a emménagé dans la région il y 15 ans, laissant famille et proches sur le Vieux Continent. Alors qu’il pleut l’après-midi, elle nous explique le procédé derrière la création de cette boisson chère à tant de lèves-tôt. Elle cultive un type d’Arabica (comme tous les Colombiens); le grain doit être rouge foncé avant d’être cueilli (un processus qui se fait principalement au printemps, et uniquement à la main). Il est ensuite mis dans une machine qui sépare la pulpe des grains; les grains sont ensuite séchés jusqu’à 9-12% d’humidité. Dans cet état, le café est prêt à être vendu aux grossistes ou exportateurs. Évidemment, il doit encore être torréfié pour révéler arômes et noirceur. Il faut à peu près 5 kg de « cerises » fraîches pour un kilo de café.
Le lendemain, en compagnie de ses deux chiens, on fait un rapide tour de la propriété, et des différentes machines avant d’enfourcher nos vélos et remonter la vallée pour rejoindre la route principale et notre prochaine destination: Pereira.
34 km et 655 mètres de dénivelé plus tard, on arrive à l’auberge de jeunesse. On décide de rester deux nuits et de consacrer la journée suivante à une marche dans une réserve naturelle. Bien qu’elle ne soit que de 6km, elle doit absolument se faire en présence d’un guide. L’aventure nous a pris la journée. Il faut d’abord trouver le premier arrêt de bus, puis patienter et espérer qu’on soit au bon endroit, tout en tentant de le confirmer auprès des locaux. Bons suisses, on commence évidemment à s’inquiéter 5 minutes après l’heure prévue. Puis, arrive le Chiva, bus coloré équipé de larges banquettes vaguement rembourrées, assez haut. Le trajet est assez épique, sur des chemins de terre pas toujours plats (c’est rien de le dire), où les rétroviseurs frappent la jungle tropicale des deux côtés et où les croisements sont plutôt millimétrés. Arrivés sur place, on mange un truc en attendant que tout le monde soit prêt à partir. On est surpris de voir une famille avec des shorts de trail fluo (vu qu’on nous avait demandé de porter des habits longs et foncés) mais aussi un couple avec chacun sa valise. Après un « échauffement », on se lance. Le guide propose de marcher groupé, surtout qu’on pourrait rencontrer un serpent en route (Margaux est hyper rassurée). La balade est choue et ponctuée d’arrêts pour parler de telle fleur et de tel arbre ou de tel oiseau. L’objectif est de se rendre à une cascade qui fait 70 mètres de haut. Elle est impressionnante et on sort nos vestes de pluie. Le retour se fait sans encombre, puis place au repas qu’on espère manger rapidement pour reprendre notre bus du retour, censé partir entre 15h et 15h30. La pluie décide de tomber en quantité une bonne trentaine de minutes avant notre départ. On scrute le ciel, croisons les doigts pour que le tout s’arrête et qu’on puisse parcourir les quelques centaines de mètres entre le resto des guides et l’arrêt de bus tranquillement. Mais à 14h55, il faut bien se rendre à l’évidence que cet espoir sera douché (sic). Motivés à de ne pas rester encore deux heures au froid en attendant le prochain bus, on se lance. Il faut éviter les grosses flaques et la boue pendant un petit moment puis, hourra, un abri. On essore les pantalons et attendons. 15h10: rien. 15h12…un bruit…ha non c’est juste un coup de tonnerre. 15h20 un autre bruit…ha non c’est juste une moto avec son chauffeur qui ressemble à Batman avec sa cape anti-pluie. 15h30…toujours rien. Alors qu’on espère qu’on a pas loupé le bus d’une minute (ah les suisses et leurs montres), une voiture rouge passe et va en direction du bâtiment des guides.
Vous savez, moi je ne crois pas qu’il y ait de bonne ou de mauvaise situation. Moi, si je devais résumer ma vie aujourd’hui avec vous, je dirais que c’est d’abord des rencontres. Des gens qui m’ont tendu la main, peut-être à un moment où je ne pouvais pas, (…)
Un grand philosophe
Cinq minutes plus tard, elle revient. Résolus à quitter les lieux, on tente un timide lever de pouce. Le signe est repéré et la voiture s’arrête. Ils vont à Pereira et peuvent nous prendre, trop bien! On s’entasse à l’arrière et constatons que le couple à valises est aussi là (apparemment, ils ne dormaient pas là comme on le pensait). Monsieur va dans le coffre et on part pour la ville, tellement reconnaissants envers le chauffeur. En chemin, on apprend que le bus est apparemment parti à 14h40 et non 15h-15h30 comme assuré par les guides. Quelques temps plus tard, on est déposés devant notre logement et remercions mille fois ce couple qui passait juste par là et qui a accepté de nous prendre; quelle générosité!
On continue dès le lendemain notre remontée vers le nord de l’axe cafetier, en direction de Manizales, en visant toujours Medellín. On l’a déjà dit, mais la Colombie centrale, c’est vallonné! Histoire de ne pas se gâcher le plaisir d’y être, on affûte nos journées pour être de longueurs plaisantes, du coup bien en deçà de nos kilométrages journaliers étasuniens! Du coup on fait un saut de puce vers Santa Rosa de Cabal le matin, avec pour idée de se rendre aux célèbres « Termales de Santa Rosa » dans les environs de la ville l’après-midi. Si la cascade qui tombe dans le complexe est très photogénique, on s’attendait quand même à mieux. Entre la réservation online (soi-disant obligatoire) impossible pour les touristes, les douches ouvertes et froides, les casiers payants « à chaque ouverture », et la pluie (ça, personne n’y peut rien); les trois bassins chauds à disposition ne contrebalancent pas vraiment. Si c’était à refaire, on irait plutôt aux thermes San Vincente, plus loin, plus chers, mais (apparemment) en meilleur état. Mais on a au moins barboté dans l’eau chaude un après-midi!
T’as où les arbres à café cousin?
Fin février, on arrive après une longue montée humide à la Hacienda Venecia, une exploitation de culture du café d’une autre ampleur; plus de 150 hectares, jusqu’à 400 temporaires pendant les grandes récoltes. On vise leur petit « hostel », au pied de 300 mètres de dénivelés qu’il faut parcourir dans la boue. On profite de deux nuits dans ce charmant endroit rempli d’arbres fruitiers et d’oiseaux plus colorés les uns que les autres pour suivre une vraie visite guidée sur tout le processus de culture, préparation et conditionnement du café, qui complète bien notre première introduction avec Maria Ángeles. Pendant plus de 3 heures (au soleil), on peaufine nos connaissances en agriculture, séchage et torréfaction. On est maintenant fin prêts pour le « Colombian, Arabica, washed, medium roast, d’origine »!
La destinations suivante est Manizales, « pointe nord » de la zone cafetière, lovée dans le brouillard andin (journée de montée avec plus de 90% d’humidité). Là, les éternelles questions retentissent à nouveau: ‘faut-il se manger plus de 4000 mètres de dénivelé pour rejoindre Medellín en quelques jours ou plutôt ranger nos vélos et poursuivre en bus (mais ne pas atteindre les 5’000 km au total)? À découvrir au prochain épisode!
Totaux (en Colombie)
- 634 km à vélo
- 7’455 m de dénivelé positif cumulé
Total depuis le début: 4’684 km à vélo