Après une bonne journée de repos à Playa Blanca à profiter de la vue sur ce magnifique lac, on a décidé de s’économiser un peu et de profiter d’y être arrivés pour n’en faire « que » le tour. Atterrissage donc dans un logement tout à fait charmant, tenu par une dame tout aussi charmante bien que très « intense »: elle tient absolument à nous décrire par le menu tous les fruits de la campagne dont elle est très fière, nous fait déguster arepas et cafés à la mode du coin, et part du principe qu’on parle tous deux parfaitement l’espagnol rapide à la Colombienne. Pas évident mais la vue depuis son logement est proprement extraordinaire, ça compense.
Le lendemain, on repart avec pour idée de viser la zone cafetière en une grosse semaine, en revenant grosso-modo sur nos pas. On attaque la journée par notre plus haut col jusque là, à 3’250 mètres; pas facile facile, mais la très longue descente sur Sogamoso nous fait bien nous rendre compte de l’effort consenti ces quelques jours passés. On re-traverse donc cette ville sans intérêt notable, traversons la vallée et visons notre hôtel réservé à l’avance le long de la grand-route principale qui rejoint Bogotá depuis cette région. On le savait déjà, mais rebrousser chemin n’est quand même pas plaisant: le « vallonné descendant » de l’aller est une pénible succession de montées dans l’autre sens. Et comme on a « déjà tout vu », on manque de motivation. Bref, après un rapide passage par une sorte de Cavagne locale (comprendra qui peut) où on déguste bières et fromages du coin, on décide que le lendemain, nous ne ferons « que » 2h30 de vélo et 500 mètres de dénivelé pour ensuite prendre le bus pour Bogotá et « couper » ainsi dans la longue autoroute du retour. (On a bien regardé, il n’y a pas vraiment d’alternative réaliste; et le nombre de cyclistes sur cette route le prouve.)
Retour à la capitale
Un week-end à flâner dans le quartier chic du « Parque 93 » de Bogotá plus tard, on décide de miser sur la même stratégie qu’avant; le bus. La route jusqu’à Armenia (au sud de la zone cafetière) paraît bien longue, se termine par une infernale autoroute de montagne au dénivelé complètement irréaliste pour nous (3’800 mètres de dénivelé positif cumulé sur 95 kilomètres) et il n’y a pas grand chose qui titille notre intérêt le long du chemin. Seule bonne nouvelle, on doit traverser Bogotá un dimanche, jour de leur Cyclovías: on a parcouru plus de 15 kilomètres entièrement sur des boulevards libérés de trafic automobile, qui est remplacé par des centaines de cyclistes et des coureurs. Pour le bus par contre, si l’expérience de Tunja à Bogotá était plutôt simple, on a bien morflé sur le trajet pour Armenia: le bus prévu à 09:15 est (apparemment) trop petit pour nos vélos, rendez-vous donc à 12:00. Ah non, en fait 13:00 pour « profiter » d’un bus plus direct. Tu parles! On a dû négocier, puis payer pour nos vélos, insister pour ne pas les démonter, enlever toutes les sacoches. On a fini par arriver à 21 heures, lessivés, notamment par le style de conduite rodéo du chauffeur. En arrivant en ville, curieuse expérience encore: en roulant, on s’est fait aborder par un couple de colombiens en voiture qui, après nous avoir suivi à vitesse modérée, a fini par nous expliquer que le quartier que nous traversions était craignos et qu’ils allaient nous escorter jusqu’à notre hôtel (propriété d’un généreux hôte Warmshowers qui nous y avait réservé une chambre). Ils ne sont partis qu’une fois s’être assurés qu’on était bien rentrés et en sécurité dans l’hôtel. Bien que nous n’avions pas l’impression que la zone était aussi dangereuse que cela, nous sommes restés bouche bée par cette attention altruiste de la part d’inconnus.
Armenia, comme dit dans notre guide, est une ville de passage sans grand intérêt. Pourtant, à une vingtaine de minutes en bus se trouve un jardin botanique qui, semblerait-il vaut la peine. Vu notre planning, on décide d’aller tester la chose. Une guide vient avec le prix de l’entrée et c’est plutôt chouette. Bon, au début on a bien senti qu’elle a sorti les présentations habituelles mais après un bon quart d’heure, on arrive à aller au-delà pour parler vélo et politique. Tout en discutant, on déambule dans une immense forêt remplie de « guadua » (nom local du bambou) et autres arbres locaux. On scrute un hiboux brun, des fourmis qui s’affairent à transporter des bouts de feuille, des dizaines de colibris et autres magnifiques oiseaux locaux. La clou du spectacle est l’espace dédié aux papillons. Environ 25 espèces s’y trouvent, toutes plus chatoyantes les unes que les autres. Certains spécimens viennent même se poser sur nos chaussures et nos mains.
Le lendemain, c’est cap sur Salento, un village à seulement 26 kilomètres d’Armenia mais avec 800 mètres de dénivelé. Il faut faire une grosse montée, puis une longue descente puis à nouveau une bonne montée. La première paraît bien plus difficile que la deuxième que nous accomplissons en 35 minutes plutôt que les près de deux heures que nous avions anticipées. On loue les bienfaits de la pause café pour Margaux et chocolat chaud-fromage (un classique ici) pour Didier. L’après-midi, on profite de se reposer un peu et de planifier la suite. Le jour d’après, on se lève au lever du soleil pour se rendre en jeep avec d’autres touristes (Salento est un hub touristique) dans la vallée de Cocora pour y faire une randonnée. Temps estimé: 5h; dénivelé: mille mètres. Prendre des bottes. Du coup, c’est équipés comme des bons garçons de ferme qu’on part. Le paysage est à couper le souffle; les immense palmiers de cire sont comme des cure-dents plantés dans ce coin de pays luxuriant et humide. Le chemin est plutôt agréable bien que bien boueux à la fin et les cinq ponts en bois, parfois très mal entretenus, sont rigolos à traverser. On termine notre boucle en trois heures trente, juste le temps de boire un café et manger un brownie pour refiler dans la jeep (ou plutôt dessus vu que les touristes surnuméraires sont invités à grimper debout à l’arrière en se tenant au porte-bagages). L’après-midi, on se félicite d’être partis aussitôt puisque la pluie tombe depuis 14 heures et on regarde pour la suite.
Elle sera relativement simple. Demain, on redescend de Salento et plutôt que de remonter directement, on va s’arrêter dans une hacienda qui fait du café pour regarder comment ça se passe et y passer la nuit. Le jour d’après, on se refait du dénivelé pour rejoindre soit un autre hameau (Filandia) soit directement une petite ville (Pereira) et continuer ainsi notre aventure.
Totaux (en Colombie)
- 536 km à vélo
- 5’485 m de dénivelé positif cumulé
- 3 cols à plus de 3’000 mètres
- crevaisons: 4 pour Melvin (mais au moins 15 imaginaires pour Margaux)
- 422 km en bus