Après notre départ (en deux fois) de la maison de Vika et Claudio à Merida, sur leurs conseils, nous partons vers la plage sauvage de Chuburná et son beau sable blanc des Caraïbes. Même s’il vente et fait un peu frais, le lieu est sublime et la route qui nous y a mené est belle. Quelques coups de pédale plus tard et un café bienvenu, on arrive à Progreso, où nous attend un nouvel hôte Warmshower. Brian est un cycliste américain et amateur de kayak qui loue une maison dans cet ancien village de pêcheurs depuis quatre hivers. Il s’arrange pour en louer une assez grande pour accueillir amis et cyclovoyageurs de passage. Même si les premiers moments de rencontre sont toujours curieux, il ne nous faut pas longtemps pour briser la glace. Il faut dire que la vue depuis la maison (avec piscine) sur le Golfe du Mexique est plutôt époustouflante! On a aussi le plaisir de rencontrer deux amis de Brian, Barbara et Tim, venus du Wisconsin comme lui, pour profiter d’une semaine de beau. On passe deux jours avec ce trio dans cette « ambassade américaine » qui fait du bien à Margaux qui peut enfin converser dans une langue qu’elle maîtrise à d’autres qu’à Didier. 🙂
Pendant notre séjour, Brian nous maintient actifs. Il emmène Didier profiter du lever de soleil en kayak (donc profiter de se lever à 6h un jour « de repos ») et nous montre son petit coin de paradis. C’est une plongée passionnante dans un village qui tourne avec et autour de nord-américains en villégiature. Entre la soirée au restaurant mexicain qui accueille musiciens « du nord » pour leur Jam session (et qui sert fish & chips) et la soirée dans la micro-brasserie américaine où le couple sur scène est également américain, le contraste avec certains bleds mexicains reculés qu’on a traversé est vraiment curieux! À la maison sur la plage, l’accueil est vraiment chaleureux, la cuisine simplement extraordinaire et les échanges avec Brian, Tim et Barbara s’étalent jusqu’à tard dans la nuit, le Mezcal aidant! On gardera un bon souvenir de ce saut sur la côte!
Mercredi 5 janvier, il est temps de se remettre en route. On vise Motul, à 60 km de Progreso. Pour y arriver, on longe la côte un long moment et tentons, entre deux grandes maisons, d’admirer le Golfe du Mexique. En arrivant dans Motul, on passe devant un centre de vaccination. Une fois les affaires posées dans notre chambre d’hôtel sans clef, on repart pour ce centre pleins d’espoirs: on cherche à savoir si on peut obtenir la troisième dose contre le COVID. La réponse est malheureusement non; si le Mexique vaccine bien les touristes, on ne figure pas dans la bonne catégorie d’âge. La nôtre arrivera dans un délai indéterminé, et le personnel de santé ne peut pas nous en dire plus, tant pis.
La journée d’après est un peu plus courte que d’habitude puisqu’on a décidé de s’arrêter à Izamal pour l’après-midi et la nuit plutôt que de juste passer par la « ville jaune ». Plusieurs théories circulent sur les raisons pour lesquelles les maisons d’Izamal sont en jaune moutarde; l’une d’elle est en lien avec la venue du Pape Jean-Paul II dans les années nonante; l’objectif était de rendre la ville chatoyante. Vu le nombre de touristes qui viennent pour ça, on peut dire que la mission est atteinte! Au-delà de la balade d’usage dans le bled, on a aussi profité de grimper sur une pyramide (les Espagnols ont construit la ville sur et autour de bâtiments mayas) pour y admirer la vue, ainsi que d’aller voir le couvent de San Antonio de Padoue. Il paraît que c’est la deuxième plus grande cour intérieure après celle du Vatican. Balèze! Autre réjouissance, la chambre d’hôtel est immense et très confortable. L’extérieur est aussi dégagé du coup on en profite pour se faire à manger sur le réchaud. Margaux peut enfin manger un peu de ces lentilles qu’elle transporte depuis San Diego.
Le lendemain, malgré notre septantaine de kilomètres à faire, on prend le temps de s’arrêter dans un cénote. Il s’agit d’un bassin d’eau claire parfois lové dans une grotte, parfois en plein air. La nôtre est complètement sous terre. Pour notre plus grand bonheur, on est les seuls à être là et à explorer la zone. C’est assez fou comme ambiance d’autant plus que ces lieux étaient sacrés pour les natifs. Aujourd’hui, il faut juste y entrer douché sans crème solaire ni anti-moustique.
L’autre endroit où nous choisissons de nous arrêter, plutôt que de juste « passer devant », est Chichén Itzá, vu que c’est sur notre chemin et qu’on dort dans le village d’à côté. Comme à Uxmal, les prix ont vraiment atteint des hauteurs « adaptées au tourisme de masse nord-américain ». Mais une fois la douleur au porte-monnaie passée, force est de constater que le site, vaste et bien restauré, en vaut la peine! La grande pyramide de Kukulchan qui accueille les visiteurs à l’entrée est dans la liste (controversée) des Sept nouvelles merveilles du monde et en arrivant devant, on comprend pourquoi.
Le lendemain, après la traversée de Valladolid, on pousse jusqu’au cénote Suytun qui a de charmantes petites « cabañas » et qui fait un bon arrêt intermédiaire sur la route pour Cancún. L’endroit semble très populaire puisqu’il faut faire la queue pour faire une photo instagramable de soi dans ce bassin sous-terrain. On ne pousse pas le vice jusque là mais nous baignons avec plaisir sans oublier de se mettre dans l’arrière-fond histoire de faire profiter de nos bobines aux férus de selfie.
Où aller après Cancún?
On se permet ce petit aparté parce que la question nous trotte dans la tête depuis un moment. Prendre l’avion, ou pas? Pour où? Voler loin pour cher? Viser l’Amérique centrale et sa moite chaleur? Costa Rica, puis Panama? Colombie, puis Équateur? Pérou, puis Bolivie? Le sud du Chili et sa célèbre Patagonie? Bref, il y’a du choix, mais aussi des contraintes: saison (apparemment février est le pire mois pour visiter le Pérou), possibilités de vols (pas de directs pour l’Équateur), dénivelé potentiel (traverser la cordillère des Andes ?). Mais le plus compliqué est (sans surprises) le labyrinthe des règles COVID, spécifiques par pays. Ca fait un moment que la célèbre Carretera Austral nous titille, et donc le Chili. Et donc probablement les règles sanitaires les plus complexes et les plus strictes du moment. De plus, les règles ne sont qu’en espagnol (c’est normal) et il faut s’immerger dans les communiqués et tweets de leur ministère de la santé pour comprendre les règles et leurs évolutions (effectives ou planifiées), sans oublier de contacter quelques ambassades pour tenter de vérifier ce qu’on pense avoir compris. On a longtemps cru qu’il fallait une troisième dose pour entrer au Chili; au final, il s’avère que nos deux vaccinations suffisent. On va donc tenter ça mais ça nous aura coûté bien quelques heures de recherches et d’ascenseurs émotionnels.
Encore deux jours de vélo pour rejoindre Cancún
Comme à notre habitude, on se fie à Google Maps pour trouver nos hébergements dans les villages le long de notre route, sous l’hypothèse qu’ils aient de la place. Et après un lever à 05h30 et 70km de vélo, on apprend vers midi que:
- l’hôtel visé n’a pas de place,
- les chambres à louer dans le magasin d’à côté sont aussi pleines,
- il va pleuvoir.
On vise donc le prochain village qui semble avoir plusieurs hôtels, mais il est à 40km et il pleut, heureusement finement. On trouvera finalement un autre cénote avec cabañas. La météo exécrable nous coupe l’envie de faire trempette dans ce bassin circulaire de quelques 80m de profond. On passe la nuit en compagnie des moustiques et Margaux de son sac de couchage. On pense qu’elle a peut-être chopé une autre, petite, insolation. Le lendemain matin, il nous faudra jusqu’à midi pour comprendre pourquoi il fait si nuit en partant le matin, pourquoi nos montres analogiques sont soudainement décalées et pourquoi la nuit a paru si courte. (Vous l’avez?) L’état du Quintana Roo n’est pas dans le même fuseau horaire que le Yucatán; et nos ordinateurs de poche ont évidemment assuré la conversion pour nous réveiller bien assez tôt!
La dernière journée de vélo n’est pas la plus intéressante: le trafic en approchant de Cancún se fait plus dense et le bas-côté moins large. Mais on arrive finalement chez notre dernier hôte Warmshowers du Mexique: Hugo!
Hugo est un cycliste paraguayen qui a vadrouillé partout en Amérique latine, actuellement au Mexique où il fait des travaux de menuiserie et de peinture dans son quartier et accueille tous les cyclistes de passage qu’il peut dans sa modeste demeure. Pour fêter notre arrivée, on s’occupe de la dernière crevaison de Melvin qui semble les attirer comme des mouches sur un pot de miel. Hugo a déjà fait marcher ses contacts pour nous aider à trouver des cartons pour faire voler nos vélos et arranger un transport jusqu’à l’aéroport à bon prix (mais surtout, avec nos gros cartons!).
Pendant le super souper préparé en commun, la conversation nous révèle qu’il attend un couple d’allemands pour le lendemain. Du coup, malgré sa générosité sans bornes, on décide d’abréger notre séjour à une nuit, pour permettre au « suivants » de profiter de la chambre et du lit (plutôt que de les laisser dormir sur sol de la pièce à vivre) et on essaie de trouver un logement pour les quelques jours qui nous séparent encore de nos vols finalement pris pour lundi. Mais Hugo a de la générosité en rab; il insiste pour offrir un cadeau à chacun de ses hôtes de passage. Malgré notre commande spéciale pour une cuillère en bois local (du sapotier), il nous offrira encore un autre cadeau de sa fabrication! On a été très touchés par son accueil, ses bons conseils, son plaisir du partage. Sa cuillère nous le rappellera souvent!
Dans le prochain épisode, on vous dira tout sur notre séjour à rallonges à Cancún!
Totaux (au Mexique)
- 1307 km à vélo
- 2267m de dénivelé positif cumulé
- 895km en bus
- pneus crevés: 4 pour Melvin et 1 pour Arion