Dans le dernier article, on annonçait qu’on dormirait lundi soir à Redcrest, avant l’Avenue des Géants. En fait, on a changé d’avis; on est trop gourmands! En se levant lundi matin à Fortuna, le temps nous paraît favorable, on enfourche nos biclous tout motivés et requinqués après 3 nuits dans ce petit cottage bien trop cher mais finalement bien confortable. La joie fut de courte durée; après 500 mètres, la pluie se met à tomber, bien assez pour nous forcer à enfiler vestes de pluie et courage matinal. À ce moment-là, on se dit que les 35km jusqu’au cabanon suffiront largement pour la journée! Une petite pause à l’abri d’un vendeur de cailloux suffit à laisser passer l’averse. Le peu de réseau disponible nous permet de confirmer (en croisant les doigts tout de même) que la suite de la journée sera favorable; on décide donc de pousser jusqu’à Miranda, charmante minuscule bourgade, au sortir de cette Avenue des Géants.
Ces géants, parlons-en! Il s’agit donc du parc national de Redwood, qui abrite plus de 30’000 hectares de forêt primaire, majoritairement composée de séquoias à feuilles d’if. Ces arbres peuvent dépasser les 100 mètres de haut et les 6 à 8 mètres de diamètre au pied. Certains sont millénaires, nous rendant tout petits et modestes. On est heureux d’avoir eu la chance de traverser cette région!
Le paradoxe: notre expérience de la Californie est humide et pluvieuse; alors que les locaux n’ont pas eu une goutte depuis mars 2021.
Mais la météo continue de jouer avec nos nerfs, et le petit « Garden resort » qu’on a trouvé pour la nuit est bien trop cher pour y rester deux nuits, on fait donc 25 minutes de vélo mardi pour aller trouver un Motel défraîchi pour bien moins cher, en espérant qu’il pleuve! (C’est un peu l’espoir: si on décide de s’abriter, autant qu’il pleuve tout ce qu’il peut pendant qu’on est dedans).
Autant dire qu’après 2 jours à Eureka, 3 à Fortuna, (une journée de vélo tout de même), et une journée à Philippsville, on s’impatiente un peu de pouvoir repartir pour de bon! La fenêtre météo s’ouvre finalement mercredi comme prévu et on rejoint le State Park de Leggett où on savait qu’il fallait dormir pour attaquer la grosse montée du lendemain frais et dispos. Déception quand même; quand il pleut peu, il manque d’eau; quand il manque d’eau, pas de douches! Ce sera donc une petite « toilette du chat ».
Ce soir là, après la « douche », on rencontre une autre paire de cyclistes, Philipp et David, soixantenaires en vadrouille de quelques jours. Un discret norvégien et un bavard américain, dont on apprendra au fil de la conversation qu’il est également hôte Warmshowers, à Berkley à côté de San Francisco-ville qu’on vise depuis le début de notre voyage. On passe une bonne partie de la soirée à absorber ses conseils et propositions d’itinéraires pour les prochains jours (et semaines), sans avoir le temps de tout mémoriser. On comprend également qu’on va suivre un itinéraire similaire et donc se re-croiser presque toute la semaine, dans une sorte d’émulation positive; en d’autres termes, ils nous mettent la pression! Jeudi, après 68 km et 1100m de dénivelé, on se retrouve dans un nouveau State Park, à Cleone, retrouvant ainsi la côte Pacifique.
Vendredi matin, arrêt déjeuner et réparation cycliste (porte-gourde et gourde à remplacer) à Fort Bragg, puis on enchaîne vers Manchester et son KOA où pour 20$ nous attendent une piscine, un jacuzzi, un coin cuisine abrité, une laverie et même une projection de film. Que des perspectives réjouissantes mais avec le bavard Philipp dans les environs, on rate le jacuzzi et le film, pour batoiller avec cet ancien employé d’une banque d’investissement qui a pris sa retraite à 40 ans.
Samedi, c’est l’occasion pour Margaux de tester sa nouvelle veste de pluie conseillée par plusieurs hôtes warmshowers. Une fine pluie nous accompagne toute la matinée. Confiants que le soleil va apparaître, on roule jusqu’à Fort Ross (gagnant donc la course contre Philipp et David qui jettent l’éponge à Gualala). On dort dans notre camping le plus décevant jusqu’ici; douches certes chaudes mais en plein air, toilettes mobiles, zéro lavabo pour faire la vaisselle et personnel peu avenant.
Autant dire qu’on ne s’éternise pas le lendemain. On dépasse Bodega Bay, rendu célèbre par « Les Oiseaux » de Hitchcock, et décidons de prendre l’hôtel le moins cher de la région, qui se trouve dans la charmante bourgade de Valley Ford pour y passer deux nuits. On annonce de la pluie lundi.
Plutôt que de terminer sur cette note grise, on tient à dire qu’il a fait beau dimanche après-midi. Les vues spectaculaires sur l’Océan Pacifique enfin baignées de lumière nous font chantonner en roulant, et nous arrêter admirer les surfeurs californiens! On aura fait nos 355km et 2800m de dénivelé cumulé en une semaine; on commence à prendre l’habitude et, bien que contents de se poser une journée, on n’est finalement pas trop crevés, tant mieux!
La suite, c’est encore 2 jours de vélo pour arriver à San Francisco en traversant le Golden Gate bridge. À l’heure où on écrit ces lignes, point encore d’hôte Warmshowers en vue, mais on ne désespère pas! On est aussi en pleine réflexions sur la suite de l’itinéraire; prendre le train pour LA? Continuer à vélo? Viser le parc national de Joshua Tree, apparemment magnifique et à la bonne saison? Raccourcir pour rejoindre le Mexique par la California Baja? Voler vers le centre du Mexique, au départ de SF ou de LA? Didier doit être sorti des États-Unis avant le 10 décembre, dans 4-5 semaines, ça restreint gentiment les options possibles! On en saura certainement plus dans quelques jours!
Totaux: 1490 km, 12700m de dénivelé positif cumulé, 3 crevaisons, 7 hôtes Warmshowers.